Questions citoyennes au conseil municipal
Posez vos questions aux élu·es de Chambéry
Légitimité de l'arrêté de non mendicité
Mesdames, messieurs, bonjour.
Témoin d'une scène qui m'a beaucoup interpellée, je souhaite questionner la légitimité de l'arrêté municipal de non mendicité sur le territoire de Chambéry.
Deux agentes de la police municipale ont, sous mes yeux, demandé à un sans abri de quitter le coin de trottoir où il était installé, en vertu de cet arrêté municipal. De façon tout à fait polie et cordiale, précisons-le.
Ce monsieur était un habitué du lieu, où il prenait le soleil en sortie d'hiver, et où sa présence ne causait aucun trouble. Il était extrêmement discret, très poli, toujours sobre, n'entravait en aucun cas la circulation des personnes et ne laissait aucune dégradation, aucun déchet derrière lui. C'était donc sa simple présence qui dérangeait, semble-t-il. En aucun cas ce monsieur ne mettait en cause ni la sécurité ni le bien être des habitants.
En comparaison, quelques dizaines de mètres plus loin, des dizaines d'habitants stationnent sur les bandes cyclables de la Rue de la Gare et de l'Avenue du Maréchal Leclerc quotidiennement. Ceux-là mettent en danger la vie de tous les cyclistes, en toute impunité, pour accéder à la gare ou s'acheter des sushis. Ce n'est pas une exagération, j'en suis témoin et victime tous les jours, et je n'ai jamais vu un seul automobiliste verbalisé (quand ce n'est pas une voiture de police qui est stationnée là...).
Ma question est donc celle-ci : la loi est-elle au service de la population, pour lui assurer sécurité, bien-être et bien vivre ensemble, ou au service de quelques bien-pensants pour leur assurer la tranquillité d'esprit de jouir de leurs privilèges sans avoir à se confronter à la misère des autres ? En conséquence, cet arrêté municipal ne pourrait-il pas être supprimé ?
PS : Je suis consciente que la ville de Chambéry met en œuvre des moyens d'accueil des sans-abris. Ces centres comptent-ils assez de places pour tous ? Sont-ils suffisamment accessibles, dans des conditions suffisamment flexibles pour s'adapter à ce public très particulier ? Enfin, certains font peut-être le choix de ne pas se rendre dans ces centres, pour des raisons variées. Qui sommes-nous pour entraver leur liberté de choix ?
Réponse du Conseil municipal :
Cette question a fait l'objet d'une réponse lors du conseil municipal du 9 mai 2022.
L’article L.2212-2 du code général des collectivités territoriales définit les missions inhérentes à la police municipale. Il précise qu’elle a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Son champ d’action comprend notamment de manière très synthétique :
- Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques ;
- Le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique ;
- Le maintien du bon ordre dans les endroits où il se fait de grands rassemblements d'hommes ;
- Le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature ;
- Le soin d'obvier ou de remédier aux événements fâcheux qui pourraient être occasionnés par la divagation des animaux malfaisants ou féroces.
Une ville qui est dotée d’une police municipale peut en définir une doctrine d’emploi. Cette dernière doit impérativement respecter les lois et règlements en vigueurs. Toutes les prérogatives des policiers municipaux sont prévues par la loi. Il n’est donc pas possible pour un maire de rajouter (ou d’enlever) des pouvoirs à ses agents de police municipale. Il est également nécessaire de rappeler que lorsqu’il verbalise, le policier municipal n’est plus sous l’autorité du maire, mais directement sous celle du procureur de la République.
La doctrine d’emploi de la police municipale de Chambéry s’articule autour de deux concepts fondamentaux qui sont la proximité et l’exemplarité.
La proximité passe par une présence visible et rassurante des patrouilles, une disponibilité, une écoute, une bienveillance ainsi qu’une recherche constante de solutions aux problèmes des citoyens. Le tout dans le cadre d’actions coordonnées entre différents acteurs (police nationale, bailleurs sociaux, associations…) d’une part, mais également par le développement de l’implication des habitants (via les Ateliers de Tranquillité Publique et de Proximité) et dont l’objectif principal reste l’apaisement de l’espace public. Il est à noter que chaque agent recruté à la police municipale de Chambéry intègre obligatoirement la brigade de proximité afin de s’imprégner de ces valeurs.
L’exemplarité enfin, est une nécessité autant qu’une valeur forte pour la collectivité. Elle passe notamment par une application stricte du Code de déontologie de la police municipale, le respect absolu des libertés individuelles et le respect des administrés et usager de la ville.
La mendicité n’est pas interdite en soi mais elle est encadrée, y compris par le droit commun qui implique que le maire assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. A Chambéry, le fait de solliciter la générosité d’autrui, tout comme d’autres activités effectuées sur le domaine public, est encadrée par l’arrêté 390 du 10 février 2015 concernant les occupations abusives occasionnant des troubles sur la voie publique.
L’arrêté municipal de 2015 a été pris suite à de nombreuses difficultés liées à des occupations abusives du domaine public par des groupes de marginaux souvent alcoolisés (notamment place de Genève) ou des personnes pratiquant une mendicité pressante devant les commerces du centre-ville. L’arrêté précise notamment qu’à l'intérieur d’une zone définie (le centre-ville), l'action de mendicité ne doit pas être prolongée, active, entraver la libre circulation des personnes, l'accès des immeubles riverains, des commerces et établissements publics. Elle ne doit également pas empêcher la jouissance pleine et entière des lieux publics dans une ambiance respectueuse et apaisée.
Faire respecter les arrêtés de police du maire est une des missions prioritaires de la police municipale. Entre le 1er janvier et le 30 avril 2022, les agents de la police municipale sont intervenus à 34 reprises sur la base de l’arrêté 390 du 10 février 2015. Cinq fois à la demande des administrés, les autres de leur propre initiative. Ces 34 interventions ont généré 18 verbalisations. Ces 18 verbalisations concernent seulement 4 personnes.
Il est important de mettre ces chiffres en perspective : sur la même période, la police municipale de Chambéry a effectué plus de 4800 interventions et réalisé plus de 4000 verbalisations. Ainsi, seuls 0.7% des interventions et 0,4% des verbalisations de la police municipale de Chambéry concernent l’arrêté 390.
Les actions de la police municipale de Chambéry concernent principalement (à hauteur de 75%) :
- Le respect du code de la route (1639 interventions) et notamment le stationnement gênant et très gênant ;
- Les troubles à la tranquillité publique (838 interventions) et notamment les regroupements occasionnant des troubles, des bruits de voisinage, la consommation d’alcool sur la voie publique ;
- La police de proximité (780 interventions) et notamment les prises de contact avec les commerçants, des habitants ou des associations et la mise en place de patrouille pédestres visibles dans des lieux particulièrement exposés à divers troubles.
Par ailleurs, l’action municipale en faveur des personnes sans-abris est importante. Il faut citer en premier lieu les subventions allouées aux associations de solidarité (Sasson, Cantine savoyarde, Banque alimentaire en particulier). La Ville met également à disposition le bâtiment de l’espace solidarité Abbé Pierre qui abrite le service d’accueil de jour porté par la Sasson et des professionnels de santé. Enfin, l’opérateur public Cristal Habitat investit avec le soutien de la Ville pour réhabiliter le bâtiment dit du « Bon accueil » afin d’y implanter un relai grand froid.
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